Brazilian Girls “Brazilian Girls”

Ni brésilien, ni girly, mais furieusement groovy, Brazilian Girls mélange dub, électro, jazz et clins d’œil culturels improbables. Avec la voix ensorcelante de Sabina Sciubba et des mélodies qui collent à l’oreille, leur musique enivrante est taillée pour les soirées où tout peut arriver.
Parfois la vie c’est une question d’option. Option érotomane : vous tapez “brazilian girls” sur Google images, et vous tombez sur : du string, de la ficelle, de la fesse, de la plage de Copacabana, de la peau huilée, du cul. Option mélomane : vous tapez “brazilian girls” sur un moteur de recherche et vous obtenez du groove en pagaille, de la mélodie en tube, du concentré de fun, de la classe musicale, grâce à ce groupe pas du tout brésilien mais américain et composé de… trois hommes et une femme, chabadabada.
Non, oublions si vous le voulez bien le chabadada sirupeux de Deauville. Ces plages brésiliennes synthétiques car reconstituées en laboratoire sont follement groovy. Le groupe pratique aussi la chanson de genre : “Pussy” est un dub enfumé à la marijuana (le refrain est on ne peut plus explicite), rehaussé de cuivres et avec une pincée de tablas. Sabina Sciubba, qui chante principalement en anglais et français (elle a vécu à Nice), a une voix d’une sensualité à vous rendre marteau, entre Suzanne Vega et Nena. D’ailleurs, Brazilian Girls s’essaie à un titre dans la langue de Goethe (“Die gendanken sind frei” : les pensées sont libres), morceau inclassable qui doit peut aux philosophes d’outre-Rhin mais beaucoup au mélanges des cultures en matière de musique. Inclassable est bien l’adjectif qui résume le mieux ce groupe. Il n’est qu’à voir le nombre de pirouettes que je fais pour essayer de vous faire comprendre que parfois, ça ressemble un peu à ci mélangé à ça tout en ne ressemblant à rien de connu. Par exemple, il y a bien une chanson dont les choeurs sonnent un peu brésilien : mais c’est “Me gustas cuando callas”, chanson en espagnol, dont les paroles sont un texte de Pablo Neruda, poète chilien.
Une basse reptilienne, des claviers malicieux, une batterie qui connait son affaire, des samples du label RealWorld (celui qui figure sur “Don’t stop” n’est pas crédité), des mélodies qui vous collent au cerveau comme un vieux chewing gum oublié en septembre sous la table de la salle de maths et qu’on arrive pas à retirer juin venu : ce groupe a trouvé LA formule. Eh bien, ce n’était pas plus difficile que ça… Voilà un disque qu’on peut passer en intégralité dans une fête pour mettre l’ambiance. Le dernier titre, “Ships in the night”, est un slow, idéal pour emballer le beau brun qui tourne près du bar depuis une heure. Des disques de ce genre, on n’en avait plus vraiment croisé depuis le “Since I left you” de The Avalanches. Il était tant qu’on se prenne une bonne vague bien fraîche. C’est fait, et mon petit doigt me dit qu’on va surfer dessus pendant quelques temps.
Brazilian Girls “Brazilian Girls”, 1 CD (Verve Forecast/Universal Jazz), 2005
****
Homme / Don’t stop / Lazy lover / Lazy lover / Sirènes de la fête / Corner Store / Long / Pussy : Die Gedanken sind frei (thoughts are free) / All we have / Dance till the morning sun / Me gustas cuando callas / Ships in the night
dimanche 22 mai 2005