L’Algérino “Les derniers seront les premiers”

Né à Marseille, Samir, alias L’Algérino, livre un rap personnel et conscient avec “‘“Les derniers seront les premiers”. Inspiré par la vraie vie, il mêle introspection, récits sociaux et gros sons pour monter en voiture. Soutenu par Akhénaton, il incarne un rap mature, entre dureté et espoir.
“Je suis un citoyen qui s’exprime avec ses tripes“, explique Samir, alias L’Algérino, jeune homme de 23 ans qui a grandi dans le quartier de la Savine à Marseille, et affiche 12 ans d’expérience dans le rap. Ce citoyen du monde a découvert le hip hop à neuf ans, grâce aux cassettes. “A 11 ans, je faisais un concert à la Castellane (le quartier de Zidane, NDR), avec le groupe B Vice Junior. Après ça, j’ai fait des mixtapes, j’ai posé sur les albums de Psy 4 de la Rime et d’AKH. J’ai fait passer mes maquettes à AKH et IAM m’a pris en première partie lors de sa tournée. L’album a été écrit pendant cette tournée et enregistré ensuite.“
“Je m’inspire beaucoup de ce que je vis et de ce que je vois, des discussions avec les potes. L’écriture, c’est mon quotidien. La télé et la radio m’inspirent : je suis chroniqueur du monde et de moi-même.” S’il n’était pas devenu rapeur, Samir se serait bien vu professeur de maths (“j’ai toujours été bon dans les matières scientifiques“) et l’on sent bien en écoutant son débit posé, ses mots choisis, sa façon cordiale de parler qu’il ne s’est jamais rêvé une carrière derrières les grilles des commissariats de la cité phocéenne. “Mon album est intime et personnel : je dis ‘je’, ça m’aide à cracher plus facilement. J’ai l’impression de parler à un ami quand je suis en studio.” Outre les membres de Psy 4 de la Rime (sur “M.A.R.S” et “Etoile d’un jour”), AKH intervient en guest sur deux titres : “il devait réaliser l’album, mais il est venu, il a vu que je savais faire, donc il m’a laissé le faire tout seul. J’ai joui d’une liberté totale dans le choix des musiques et des textes. On m’a laissé mon franc-parler. Beaucoup de gens parlent de la rue comme d’un fantasme. J’essaie de parler de la vraie vie : chômage, précarité, voile, pas de guns et de shit. Les gens peuvent s’y retrouver.” L’Algérino parle du commandant Massoud, des grands-parents qui ont aidé à libérer la France et qu’on a ensuite parqué dans des ghettos, et il a le mérite de s’impliquer en assumant des points de vues dans ses tracks. “Mais je ne répugne pas à être moins cérébral. Il y a certains titres de gros son sur l’album (“On est là”), des titres pour monter en voiture. Je suis méridional, donc je suis un peu flambeur“.
Un flambeur qui a des références : “Les derniers seront les premiers” est une phrase de la Bible et Céine Dion en a fait une chanson. Il fallait que cet album soit étiqueté du label d’Akhénaton pour qu’on passe outre. Après écoute, on a bien l’impression d’avoir fait la connaissance d’un rimeur conscient, et non d’un tchatcheur caricatural. “Ce titre, c’est pour ceux qui sont en galère, même en galère morale, explique Samir. Et c’est pas qu’une question d’argent : il y a des riches qui sont mal dans leur tête, aussi. Ça veut dire que la roue tourne. Ça résume bien l’album : le discours est dur et réaliste, mais il y a une touche d’espoir.” Samir étant lui même l’un des espoirs d’un rap enfin adulte, il sait de quoi il parle.
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L’Algérino “Les derniers seront les premiers”, 1 CD (361 Records/Naïve), 2005
Honneur et bravoure / Est-ce que tu m’as vu ? / On est là ! / On revient de loin / Les derniers seront les premiers / Sans retenue aucune / La rêve français (ma princesse) / J’dénonce / Témoin muet / Etoile d’un jour (featuring Soprano) / Dans le mouv’ (featuring Akhenaton) / En force / 21 / M.A.R.S (featuring Segnor Alonzo-Soprano-Don Vincenzo-Akhenaton-Shurik’n) / Levez le voile sur vos pensées / T’sais c’est qui, qui cause ? / Envoie l’son / La patience est une arme
mercredi 15 juin 2005