Horsesugar “Clémence”

Horsesugar “Clémence”

Un disque à ranger dans la discothèque des gens exigeants, entre Programme et Expérience, pas loin non plus de Joy Division, The Cure, The Chameleons. Vous avez déjà tous bijoux de 4AD (Bauhaus, This Mortal Coil, Dead Can Dance) ? Ce coup de coeur aux plaisir inconnus est un diamant noir de plus.

Dans un livre d’Hervé Guibert, il est dit qu’un critique devrait se branler, s’asoiffer et s’affamer avant de critiquer une oeuvre. Il faudrait être profondément décentré de soi-même avant de se pointer devant un tableau, de s’asseoir dans une salle obscure ou d’ouvrir un livre. Pour voir si l’oeuvre arriver à annuler la sensation de la soif, de la faim, si elle apporte quelque chose qui calme la libido, la transcende. Par une hasard inouï et pas inintéressant, je suis bien décentré ces jours-ci, à l’heure où je prends la plume. D’ailleurs j’ai bien failli ne jamais pouvoir écrire sur cet album sombre, vénéneux et super réussi. Pardon pour le retard les gars, j’avais failli m’abonner à “La Vie du Rail”.

Ce disque, je l’ai découvert sous 100 grammes de Sertraline, sur le Net, puis l’ai reçu sous 50 grammes, et ai ouvert le blister sous 75 grammes + un cachet quotidien de ce truc qui finit en “pine” et qui je crois fait partie de la famille des benzodiazépines. Car on écrit mal sous une dalle de granit, ou d’autre chose du reste.

Bref je suis là, le site est encore en ligne et j’écris ce qu’il me reste et c’est un double plaisir car il vaut rudement le coup cet album français. Rock oui, mais c’est quoi le rock français ? Pendant longtemps ce fut une pâle copie de ce truc né dans le sud profond des States et qui nous fut vendu avec le plan Marshall après guerre pour américaniser la Vieille Europe, pour amollir sa culture. Disney qui pille Grimm, Collodi, Perrault and Co pour nous les vendre sur celluloïd, vous la voyez venir l’arnaque à X milliards ?

Peu de gens de l’Hexagone ont su créer quelque chose de vraiment personnel en cinquante ans : Noir Désir ça ressemblait quand même beaucoup à Gun Club non ? Ah si, les Toulousains de Diabologum. Ne pas se disperser surtout : le disque est noir, les paroles étranges, la rythmique électronique. C’est houellebecquien à souhait (“Michel” est-il un hommage au romancier et poète auteur de… “Rester Vivant”?) et ça prend aux tripes comme rarement. Se souvenir qu’on a des tripes, en être reconnaissant à la Vie même si c’est une salope. La vie continue, mais peu de disques passeront le filtre désormais. J’en ai marre de la musique bourgeoise.

Règle incontournable désormais : si ça ne gratte pas comme un oursin dans un caleçif, je n’en parle pas. C’est dire si Horsesugar qui chante/crie suis-je le Christ ou un enculé ?” gratte sévère, façon Lorette Nobécourt (“La Démangeaison”). “Clémence” passe très clairement à travers le filtre. A écouter en grelotant chauffage éteint, un thé bien chaud entre les mains. Pas un grog parce que les médocs de la liste 1, ça se marie mal avec l’éthanol. France, écoute vite ce disque avant qu’on te coupe l’électricité.

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Infos : https://horsesugar.bandcamp.com/album/cl-mence

Alain Cattet

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