Stupeflip “Stupeflip”

Voici l’album-événement de ce début 2003 : Stupeflip a fait la couverture des Inrocks en compagnie de Michael Youn, et s’affiche un peu partout … Même à la télé, de “Top of the Pops” à “Paris Dernière”. En janvier 2002, c’était Electric Soft Parade qui avait ce même rôle de mettre en émoi la presse. A croire que la major BMG s’en soit fait une spécialité. Exit les petits prodiges rock de Brighton (qu’est-ce qu’ils deviennent au juste ?), place à un trio parisien : Stupeflip, dont Le Mouv’ a matraqué “J’fume pu d’shit” depuis l’année dernière.
L’album de Stupéflip, c’est l’histoire du Crou, une organisation un peu mystérieuses avec des membres un peu bizarres. King Ju, MC Salo et Cadillac sont les trois hérauts de cette nébuleuse intergalactique. On ne sait que penser, en fait, de cet album qui enchaine les chansons à base de hip hop et de guitares, et des saynètes marrantes (notamment celle qui ouvre “A bas la hiérarchie” où un stagiaire dit un petit chef : “j’étais au self, ils ont un très bon gratin dauphinois.) C’est bien foutu, énergique. Et c’est marrant, pas prise de tête, sur les sketchs, les voix sont traficotées… Il y a plein de références à des personnages freaks que personne ne connaît… (King Ju s’est fait écraser par un vélo et revient se venger). Des sketchs, des voix traficotées, un univers “je fume et j’invente une saga à mon groupe”… tout ça rappelle beaucoup Billy Ze Kick et Les Gamins en Folie, qui chantaient “Jean-Mich’ Much’ et ont eu son hit avec “Mangez moi” (une chanson sur les champignons halucingènes) en 94. Billy Ze Kick non plus on ne comprenait pas ce qu’elle disait.
Joints, champignons, vous ne trouvez pas qu’on est un peu dans le même univers ? Les membres de Stupeflip répondent aux interviews masqués. Ah, ça, un masque, rien de mieux pour donner de l’aura à un artiste. N’est-ce pas Daft Punk et leur casques de robots au prix d’une berline allemande ? Stupeflip ne coûtent pas cher à leur label en déguisement. De même qu’ils ne doivent pas dépenser des sommes astronomiques en entretien si l’on en croit la porcherie dans laquelle ils ont reçu le très chic Frédéric Taddeï lors d’un récent “Paris Dernière” (mais était-ce vraiment leur appartement ?) avant de lui chanter : “ton émission, tu peux te la carrer au cul.” Revenons-en au disque : certaines chansons sont tout à fait marrante : “Comme les Zot'” est un florilège de paroles de chansons célèbres, un collage de “je suis malade” (Lama), “je suis un bande de jeune” (Renaud), j’ai perdu la tête” (Brillant), et le feat. Melanie Bauer (Ouï FM) en animatrice-nunuche, amusant. Mangu, dont on se rappelle avoir un peu entendu le titre “Calle luna, calle sol” en 1998, apparaît sur deux titres. Côté humour encore, “L.E.C.R.O.U.” assène des phrases choc comme : “pétrir, c’est modeler, péter, c’est démolir”, tout en mettant en garde l’auditeur (et le critique) de coller une étiquette au groupe.
Mais voila, la chronique touche presque à sa fin et je n’ai pas beaucoup parlé de la musique de Stupeflip. Oui, mais quand on fait tout pour ramener l’attention sur soi à l’aide d’artifices qui n’ont rien à voir avec la musique, c’est le risque. Alors cet album ? Votre petit frère encore en plein âge bête ou votre voisin-qui-est-si-naze va l’acheter… L’emprunter devrait suffire.
★★☆☆☆
Stupeflip “Stupeflip”, 1 CD (Vorston & Limantell/BMG), 2003
Le Crou ne mourra jamais / Stupeflip / Présentation du Crou / Je fume pu d’shit / J’refume du shit / Explication n° 1 / L’épouvantable épouvantail / Naissance de la région sud / Les monstres / Crou nostalgie / Avertissement / Carry on / Comme les zot / Média terror / L.E.C.R.O.U. / Création de la deuxième ère du stup / A bas la hiérarchie / La bavure de pop hip / The Cadillac theory / Passe mon truc / Stupeflip (Home version) / Annexion de la région sud