La liberté fait-elle encore rêver les Français ?

La liberté fait-elle encore rêver les Français ?

“Le Canard Enchaîné” de ce jour offre la recension d’un recueil d’articles d’Albert Camus, “Actuelles IV”, parue chez Gallimard (voir). En 1955, confie le Palmipède, l’écrivain constatait avec grand regret que dans une enquête d’opinion de “L’Express” intitulée “Comment les Français conçoivent le bonheur ?”, seuls 4 Français sur 1000 déclaraient : la liberté.

Taquin comme je suis, j’ai cherché sur le Net un sondage récent sur le même sujet : “Qautre Français sur cinq se déclarent heureux” expliquait Ipos en 2019 (consulter). On était donc avant les confinements du au Covid : “Les Français sont dans la moyenne mondiale en ce qui concerne la santé (52%) et les enfants (48%), mais s’en distinguent sur le rôle de l’argent comme source de bonheur, « en avoir davantage » (45%) et « améliorer sa situation financière » (46%) passant avant la relation avec le/la partenaire (43%), le sens de la vie (39%) et la sécurité (34%)” expliquait alors Pierre-Yves Bardon, directeur du programme Flair, Ipsos Knowledge Centre.

Quid de la liberté ? Elle n’est pas citée… C’est pourtant le premier mot de la devise républicaine, à moins qu’un jour la Macronie opte pour “algorithmes et surveillance” ou “La loi, le Roi”. “Un peuple prêt à sacrifier un peu de liberté pour un peu de sécurité ne mérite ni l’une ni l’autre, et finit par perdre les deux” : la citation attribuée à Benjamin Franklin est apocryphe, certes, mais elle résonne tristement. Qu’est-ce qui fait rêver les Français alors ? Acheter une trotinette ? Pouvoir fourrer une dinde aux marrons ? Avoir Netflix ET Disney+ ? Un peu tout cela sans doute, mais aussi l’expatriation, expliquait Ipsos.

Camus, qui connaissait bien le mythe de Sisyphe, et disait qu’il faut l’imaginer heureux malgré son rocher à rouler sans cesse, Camus donc avait deux muses : la vérité et la liberté, “maîtresses exigeantes puisqu’elles ont peu d’amants“. C’est peu dire qu’aujourd’hui peu de gens les courtisent.

Jean-Marc Grosdemouge