Berthet "Equivoque"

Berthet "Equivoque"

Après avoir bossé dans la presse musicale (il fut chef de publicité des magazines “Guitar World”, “Bass & Drums” et “Musicien”), et avoir bourlingué dans divers groupes, le lorrain Pierre-Olivier Berthet a décidé en 1997 de se présenter sous son nom, et rien que sous son nom.
Après un passage chez Barclay, une truffe d’or de Périgueux reçue en 1999 et une centaine de concerts, le revoici sur une structure rochelaise, pour un album en forme de “carnet de doutes”, pour reprendre les termes de la chanson “Romane”.

Outre quelques morceaux rock (“Sous les pavés (Maria)”, “Romane”), normal pour quelqu’un qui a pris une claque avec Deep Purple ou Trust, ou jazzy (“Equivoque”), et des ballades à la Blankass (“Comme un nom d’école”, “En devenir”) Pierre-Olivier Berthet déroule une pop classe qui évoque Les Innocents.
Ce qui fait plaisir à Berthet quand on le lui fait remarquer : “j’ai été très fan de “Cent mètres au paradis”, confie-t-il. A la maison ma mère écoutait les grands standards de la chanson française (Brel, Reggiani, Barrière, etc…), mon père rien du tout ! Mais en 1980, il m’avait ramené du Japon l’un des tous premiers balladeurs, avec la radio”.

C’est cette radio qui va permettre au jeune Pierre-Olivier de se forger une culture musicale : “le soir j’étais collé sur les grandes émissions rock de l’époque : “Feedback” de Lenoir sur France Inter (où je découvrais, les Clash, Gang of Four, Cure etc.), “Wango Tango” de Zégut sur RTL (ACDC… qui reste mon groupe préféré… et “Live” de Dominique Farrand sur RTL aussi avec des trucs plus “commerciaux” comme Toto… Le premier choc musical de Berthet reste “Yellow Submarine”, “braillé par un folksinger dans les rues de Metz”.

Les paroles par Valérie Fauchet, parolière rencontrée à Astaffort (dont les célèbres “rencontres” sont patronnées par Francis Cabrel) ou par Berthet lui-même. Quand il écrit, Berthet choisit des tranches de vie : “”Maria” date de 1993, période guerre Serbo-Croate… J’ai toujours détesté tout ce qui peut avoir un rapport avec l’armée et en même temps ça exerce une sorte de fascination, ça c’est juste une histoire qui pourrait avoir lieu n’importe où et n’importe quand… Des politiques ou des religieux prennent le pouvoir, déclarent la guerre et tu te retrouves avec un fusil dans les mains avec ta peau à défendre…”
D’autres thèmes sont plus légers : “Le titre “Comme une île” raconte l’envie de faire un break de prendre du recul et aussi de se sentir loin de la réalité, comme si on volait… J’ai fait du vol à voile, quand j’étais jeune et j’en ai un souvenir de liberté absolue… “Romane” raconte un arrêt sur l’autoroute le 12 septembre 2001, il n’y avait rien d’autre à la radio que des blablas sur les attentats de la veille. J’étais en plus un peu speed parce que j’avais rencontré une nana que je trouvais géniale avec qui j’aurais eu envie de passer plus de temps… Mais j’avais été obligé de la laisser, à un autre en plus… “Père Lachaise” est une ballade… au cimetière du Père Lachaise. Mon batteur qui a écrit cette chanson raffole de cet endroit…”
“Il n’y a pas de lignes directrices sur cet album”, concède Berthet. Il n’y en a pas dans ce que je fais”, explique d’ailleurs ce multi-instrumentiste qui donne des cours à l’x-CMCN de Nancy après y avoir pris des cours il y a quelques années. “Equivoque” embrasse divers univers. “Pour faire un album “concept” encore faut-il en avoir un ! (sourire), ajoute-t-il. En plus je préfère ne pas me limiter dans mes orientations musicales, je pense que les arrangements et le timbre de ma voix suffise à “lier” l’ensemble… Sur mon premier album, “Pudeurs”, sorti chez Barclay, introuvable aujourd’hui sauf sur les réseau de peer to peer… (sourire) la musique était encore plus variée… En tout cas les variations de ce jeune homme qui papillonne entre chanson française exigeante et pop facile (sans qu’il y ait dans cet adjectif une once de reproche) séduisent.

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Berthet “Equivoque” (Cristal Records/XIII bis Records), 2004

J-Marc Grosdemouge