Goldie “Timeless”

Goldie, prodige de la drum and bass et figure culte des années 90, livre avec “Timeless“ un album fondateur qui marie rythmes frénétiques et mélodies envoûtantes, redéfinissant les codes d’un genre naissant.
Petit ami de Björk durant les années 90, Goldie est lui aussi un esprit bien barré musicalement, dans un genre un peu moins connu : la drum and bass. Son album sorti en 1995 reste un classique du genre et a marqué une étape essentielle dans l’histoire de la musique électronique. Si l’album “New Forms” de Reprazent, sorti en 1997, est l’album jungle qui a fait exister ce genre aux yeux d’un large public, “Timeless”, sorti en 1995, soit un an après l’explosion de la drum and bass outre-Manche, est celui qui l’a fait exister tout court.
Goldie (alias Clifford Price, ainsi surnommé en raison de sa dentition dorée) sort donc son album. Dans le premier morceau, justement nommé “Timeless” (et qui dure 21 minutes), il reprend l’un de ses singles, “Inner City Life”, chanté par Diane Charlemagne, suivi de “Pressure” (également chanté), lui-même suivi de “Jah”. Ce morceau d’ouverture, ambitieux et monumental, incarne parfaitement l’identité sonore de l’album : un mélange de rythmes syncopés tirés de l’Amen break, de lignes de basses profondes, et d’éléments mélodiques comme des cordes atmosphériques et des voix soul. Il pose une dynamique à la fois complexe et captivante qui se maintient tout au long du disque.
Puis vient “Saint Angel”, un morceau fiévreux et sec comme un coup de trique, où les basses s’entrechoquent avec une énergie brute. Quant à “State of Mind”, il commence par quelques notes de piano qui évoquent le meilleur de Jamiroquai… mais le meilleur de Jamiroquai, c’est son premier album, le second à la rigueur et basta ! On s’éloigne alors de “Saint Angel” pour plonger dans un morceau plus sensuel et languide, porté par des beats chaleureux et souples comme de la bonne soul music.
Ce mélange de sophistication mélodique et de puissance rythmique est ce qui distingue “Timeless” des autres albums de l’époque. Là où beaucoup de productions drum and bass se concentraient sur l’énergie brute des clubs, Goldie a introduit une nouvelle dimension, plus émotionnelle, et prouvé que ce genre pouvait atteindre un haut niveau de complexité artistique.
Certains critiques n’ont pas manqué de relever l’audace de Goldie en appelant son premier album “ Intemporel”, un titre presque prétentieux pour un coup d’essai. Pourtant, près de trois décennies plus tard, il est clair que ce disque a tenu ses promesses. Il est devenu une référence incontournable, figurant même dans des ouvrages comme “Les 1001 albums qu’il faut avoir écoutés dans sa vie” de Robert Dimery.
Avec “Timeless”, Goldie a non seulement capturé l’effervescence des clubs londoniens des années 90, mais il a également élevé la drum and bass au rang d’art. Ce disque n’est pas seulement un classique du genre, il est une œuvre fondatrice qui continue d’influencer les artistes et de fasciner les auditeurs.
★★★★★
Goldie “Timeless”, 1 CD (Ffrr/Barclay), 1995