Gene “Olympian”

Dandysme pop. Un romantisme ombrageux, des guitares aux éclats feutrés et une voix qui frôle l’implosion : “Olympian” incarne cette Britpop des marges, plus élégiaque qu’arrogante. Ni hymne de stade ni manifeste arty, mais une confession à fleur de peau, portée par l’ombre bienveillante de “The Queen Is Dead“.
Si l’on devait composer un album photo de la Britpop, “Olympian” de Gene serait cet instant figé entre deux pages de “Select Magazine“, où le spleen croise l’élégance d’une coupe impeccable. Sorti en 1995, alors que Blur, Oasis et Suede marquaient chacun leur territoire, Gene arrivait avec son romantisme ombrageux et ses guitares nappées d’une ferveur très “The Queen Is Dead“. Trop inspiré par The Smiths pour être totalement culte, trop raffiné pour la hargne beauf de “Definitely Maybe“, “Olympian” est pourtant un disque à redécouvrir.
Dès “Haunted by You“, la voix de Martin Rossiter se déploie avec un lyrisme blessé qui rappelle Morrissey sans l’ironie mordante. Il y a chez lui une gravité sincère, un chant habité qui transforme chaque chanson en confession. “Sleep Well Tonight” joue sur une tension qui ne se relâche jamais vraiment, tandis que “London”, Can You Wait?” capture cette errance urbaine et amoureuse que tant de groupes ont tenté d’écrire sans atteindre cette justesse.
Là où Blur jouait les cockneys exubérants et Oasis les prolos bagarreurs, Gene cultivait une certaine classe à la mode des outsiders. “Truth, Rest Your Head” et “A Car That Sped” regorgent de guitares ciselées, portées par une rythmique implacable qui aurait pu faire les beaux jours de “Dog Man Star“. L’album culmine avec “Olympian“, morceau-titre majestueux où Rossiter fait chavirer l’ombre de Morrissey vers quelque chose de plus viscéral, moins maniéré.
On vous vous venir avec votre question : pourquoi redécouvrir “Olympian” aujourd’hui ? Parce que la Britpop n’a pas été qu’une guerre de deux camps. Parce qu’au milieu des hymnes de stade et des hymnes arty, Gene proposait une alternative plus feutrée, plus élégiaque. S’il n’a jamais eu l’impact commercial des mastodontes du genre, “Olympian” a su traverser le temps avec cette mélancolie qui sied aux disques de chevet.
★★★★☆
Gene “Olympian” (Polydor), 1995, d’occasion, dans les cartons de ton ex ou sur les plateformes d’écoute
Haunted by You / Your Love, It Lies / Truth, Rest Your Head / A Car That Sped / Left-Handed / London, Can You Wait? / To the City / Still Can’t Find the Phone / Sleep Well Tonight / Olympian / We’ll Get What We Deserve