Maurice Duruflé – “Requiem” : la lumière au bout du chant

Un Requiem qui n’essaie pas de terrasser la mort mais de l’apprivoiser. Un chef-d’œuvre de lumière intérieure, à (re)découvrir les yeux fermés.
Il y a des œuvres qui s’imposent sans hausser la voix. Pas besoin d’orages symphoniques ou de fracas grandiloquents : Maurice Duruflé, organiste et compositeur discret, a écrit l’un des plus beaux Requiem du XXe siècle en 1947, entre ascèse et recueillement. Une partition où le grégorien croise la transparence harmonique de Fauré, une pièce qui apaise plus qu’elle ne terrifie, qui console plus qu’elle ne tonne.
Inspiré par les chants liturgiques médiévaux, Duruflé ne compose pas un Requiem de larmes et de fureur, mais un office lumineux, presque suspendu. À la manière de Fauré, il contourne la rigueur dramatique d’un Mozart ou d’un Verdi : ici, pas de Dies Irae vengeur, mais un chant en clair-obscur, un équilibre fragile entre l’ombre de la mort et l’espoir d’une paix céleste.
Requiem de résignation ou d’élévation ?
La partition existe sous trois versions – pour orchestre et chœur, orgue et chœur, ou orchestre réduit – mais dans tous les cas, c’est la fluidité qui domine. L’orgue n’écrase jamais, les chœurs avancent en vagues douces, et les solistes semblent prier plus que déclamer. Mention spéciale au “Pie Jesu”, instant suspendu où la voix solo semble s’élever dans un rayon de lumière.
Certains y voient la trace d’un monde qui vient de traverser la guerre, un besoin d’apaisement après le fracas. D’autres y entendent une foi inébranlable, presque intime, qui renoue avec le chant grégorien comme un retour aux sources.
photo : www.durufle.org