Alain Chamfort "Le plaisir"

Alain Chamfort "Le plaisir"
Entre nostalgie et renouveau, Alain Chamfort se réinvente sans renier son passé. Du dandy des années 70 à l’artiste en quête d’un second souffle, son dernier album confirme que, malgré quelques faiblesses, le chanteur reste un maître du style et de la mise en scène.

Dandy, Alain Chamfort a toujours aimé se mettre en scène : sur son best of, que Sony Music (qui lui a rendu son contrat il y a quelques années) remettait en vente cet été, il chantait “ce n’est que moi, ne craignez rien, ce n’est que moi vot’ vieil Alain. J’demande quand même pas le Pérou, j’demande qu’on m’aime et puis c’est tout”. Et de se décrire comme un chanteur en voie (voix ?) de ringardisation, à qui les filles demandent des autographes… pour leur mère. Mais une carrière, ça ne s’arrête pas comme ça : d’ailleurs Christophe, issu des “yé yés”, et qui a en commun avec Chamfort de s’être fait virer du label Epic, a redonné un second souffle à sa carrière il y a deux ans avec “Comm’ si la terre penchait”.

Revoici Alain Legovic, Breton aux cheveux poivre et sel courts, après les avoir eus longs. Chamfort : celui qui doit son nom au philospohe (hasard du dictionnaire), celui qui commenca sa carrière chez Claude François (les disques Flèche), celui aussi qui connut de gros succès (dans les années 70-80 : “Manureva”, “La fièvre dans le sang”, “Chasseur d’ivoire”, “Traces de toi”, “Bambou”, et dans les années 90 : “Souris puisque c’est grave”, “Clara veut la lune”) mais aussi de gros creux. Sorti en 1997, “Personne n’est parfait”, album ambitieux, n’a pas rencontré son public. Il révélait pourtant un Chamfort nouveau : jazzy, électro, avec toujours Duvall et Moulin en hommes de l’ombre. Christophe connut des déboires similaires avec son album “Bevilacqua”. Mais au contraire de Christophe, qui a connu un retour en grâce en se plongeant dans l’électro, c’est avec le pop-rock que Chamfort repart la fleur au fusil. Et il s’entoure de Domenico et Jacques Erhart, les deux artisans du retour d’Henri Salvador.

Hélas, Chamfort n’a pas la voix du Guyanais (perfide, Gainsbourg avec qui il avait travaillé l’avait même surnommé “Chant faible”), et même si les cordes évoquent le dernier album de Louis Chedid (“Bouc Bel Air”), Chamfort n’a pas non plus le swing de ce dernier. Et les chansons marrantes (“Les amies de Mélanie” avec ses inévitables rimes en “i” comme savent en faire les paroliers débutants ou neuneu) lui vont mal. “Plus douce sera la chute” chantait Alain Chamfort sur son précédent album. Il décrivait l’envie de ne plus lutter quand arrive la fin. Heureusement, ce n’était qu’une chanson. Non seulement il n’y pas de chute, ni dure, ni douce, pour Chamfort, mais un vrai retour aux affaires, qui fait plaisir. Dommage dans ces conditions qu’il ne soit pas plus convaincant.

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Alain Chamfort “Le plaisir” (Delabel/EMI)

Jean-Marc Grosdemouge