The Sex Pistols “Never Mind The Bollocks, Here’s the Sex Pistols”

Les Sex Pistols ne voulaient pas durer, et c’est pour ça qu’ils sont éternels. Comme un pétard balancé dans le bureau du surgé, “Never Mind the Bollocks” est un disque qui explose à chaque écoute. Un chaos pur, et un pied de nez immortel à toutes les convenances.
L’album fait scandale dès sa sortie. Il est banni de certains magasins, conspué par la presse, honni par l’establishment. Mais il est aussi un succès immédiat, atteignant la première place des charts britanniques, qui pose la question : pourquoi ce surgissement du punk, venu comme une force irrésistible ?
J’enfile mes demi-lunes de chez Optic 2000 et je vous explique. Pour pas mal de gens, dont un proprio de magasin londonien de fringues (McLaren), le rock était devenu trop propre, trop sérieux, trop virtuose. Il fallait tout saccager, tout réduire en cendres, et les Sex Pistols s’en sont chargés avec une jubilation absolue. “Never Mind the Bollocks, Here’s the Sex Pistols”, c’est l’irruption sauvage d’un bulldozer dans un musée. Un album conçu pour déranger, pour insulter, pour provoquer, mais surtout, pour réécrire les règles. Il n’y a rien de subtil ici : tout est brut, tout est frontal. Si vous voulez une analyse sang-selles-urines de ces gars ils vous tendent leur slibard. Troué.
Dès “Holidays in the Sun”, le ton est donné. Une marche militaire, un riff écrasant, et Johnny Rotten qui éructe comme un prophète de l’anarchie, cachez les mômes ! Appelez l’exorciste du diocèse ! Ce n’est pas une simple chanson, c’est un manifeste. Les guitares de Steve Jones sont épaisses, massives, sans fioritures. La basse de Sid Vicious, à peine audible, est une posture plus qu’une contribution musicale. Mais qu’importe, l’énergie est là, brute, incontrôlable.
Puis vient “God Save the Queen”, charge au napalm contre la monarchie britannique. Interdit d’antenne, censuré dans les charts, le titre devient un symbole. “No future for you!” hurle Rotten, et c’est toute une jeunesse désenchantée qui reprend le cri en chœur. Anarchy in the U.K., enregistré avant l’arrivée de Vicious, est encore plus radical. Ce n’est pas une chanson, c’est une déclaration de guerre.
Mais “cet album sous pochette jaune citron fluo ne se résume pas à trois hymnes de chaos. “Pretty Vacant”, avec son riff d’ouverture mythique, est presque pop dans son efficacité. “No Feelings” et “Liar” vomissent leur cynisme avec un aplomb jubilatoire. “Problems” et “Seventeen” enfoncent le clou : les Sex Pistols n’ont aucun message, aucun espoir à offrir. Juste la destruction pure, le dégoût et l’ennui sublimés en rage adolescente. On se lève et on casse.
Quarante ans plus tard, le chaos de “Never Mind the Bollocks” est toujours intact, et sa brutalité toujours (voire de plus en plus ?) nécessaire. Les Pistols n’ont peut-être duré qu’un instant, mais cet instant a suffi à faire trembler le monde. Et puis, punk un jour, punk toujours, puisque “there’s no future”.
★★★★★
The Sex Pistols “Never Mind the Bollocks, here’s the Sex Pistols”, 1977
Holidays in the Sun / Bodies / No Feelings / Liar / God Save the Queen / Problems / Seventeen / Anarchy in the U.K. / Submission / Pretty Vacant / New York / EMI
Cours mettre ça dans ta playlist :
- “God Save the Queen” : l’hymne ultime de la provocation.
- “Anarchy in the U.K.” : une déclaration d’intention incendiaire, très haut sur l’échelle de Scoville, appelez-les Tabasco.
- “Pretty Vacant” : un faux air pop pour un titre au nihilisme total.
- “Holidays in the Sun” : une ouverture martiale et implacable.