Todd Rundgren, le savant fou du soft-rock cosmique

Figurant dans la discothèque rock idéale de Manoeuvre (voir notre article), “A Wizard, A True Star” de Todd Rundgren est sorti en 1973 comme petite bombe. C’est une explosion d’audace musicale, mêlant pop, soul et psychédélisme dans un tourbillon expérimental qui défie les genres. Né en 1948 et toujours de ce monde, Rundgren, tel un savant fou, expérimente sans relâche, entremêlant pop, soul, prog et psychédélisme pour créer un kaléidoscope musical unique. Un voyage audacieux et inoubliable dans l’esprit d’un génie insaisissable.
Todd Rundgren est une comète qui brûle tout ce qu’elle touche. Un mec avec une tête de génie sorti tout droit d’un épisode de “The Twilight Zone” et des mains capables de construire des cathédrales sonores ou de tout foutre en l’air avec la même intensité. Il est là, planqué dans son studio, entouré de machines et de câbles comme un savant fou des années 70, le genre qui peut te pondre un tube parfait avant de te balancer un disque expérimental que personne, même lui, ne comprend totalement.
Écouter Todd, c’est comme grimper dans un train fantôme où les rails sont faits de riffs de guitare trop propres pour être honnêtes, de claviers qui suintent les étoiles, et de lignes vocales qui t’embrassent ou te giflent, selon son humeur. Ce mec te sort un album comme “Something/Anything?” et tu te dis : “OK, il a tout compris à la pop.” Puis il t’enchaîne avec “A Wizard, A True Star” et là, c’est : “Mais qu’est-ce que je viens d’entendre ?” Tu restes cloué, la tête remplie de couleurs que tu n’avais jamais vues avant.
D’autant que les titres et les ambiances s’enchanient à un rythme effrené car Rundgren a réussi à inclure un nombre impressionnant de titres sur chaque face du vinyle (jusqu’à 12 sur la A) en optant pour des morceaux plus courts et enchaînés de manière fluide, créant ainsi une expérience d’écoute continue. Cette approche a permis de maximiser la durée totale de l’album, atteignant près de 56 minutes, ce qui était exceptionnel pour un disque vinyle à l’époque.
Le truc avec Rundgren, c’est qu’il ne joue pas la carte du cool. Non, lui, il est là pour bosser. Genre, vraiment bosser. Écrire, produire, tout enregistrer lui-même s’il le faut, et il empile les sons sur les pistes, jusqu’à ce que ça craque. C’est un one-man-band qui te regarde avec ce regard à moitié endormi mais qui voit tout. Et si ça ne te plaît pas (l’album peut divisier), il s’en fout. Il ne joue pas pour toi, il joue pour cette étrange alchimie qu’il a dans la tête, ce mélange de mélodies parfaites et de bordel sonique.
Mais ne te méprends pas : ce n’est pas qu’un gars qui s’amuse à bricoler des synthés dans son garage. Todd, c’est aussi le gars qui te sort des ballades comme “Hello It’s Me”, qui te fait pleurer comme un bébé alors que tu ne pensais pas avoir de larmes en réserve. C’est un type qui peut passer de l’artisan au démiurge sans prévenir, tout en te balançant une ou deux blagues bizarres au passage.
Il est insaisissable, Todd. Pas besoin de chercher à le comprendre, il ne veut pas de ta validation. Le mec construit des ponts entre des mondes que tu ne savais même pas connectés : la pop, la soul, le prog, la marche militaire (“Zen Archer”) même ce truc qu’on appelle aujourd’hui l’électro avant l’électro. Il est là, en avance sur son temps et peut-être même sur le nôtre, mais toujours présent, toujours pertinent.
Alors oui, Rundgren, c’est le type qui peut être ton meilleur ami un jour comme Zappa ou les Beatles de “Sgt Pepper”, et c’est aussi le savant fou du laboratoire sonore qui te fait flipper le lendemain. Et si ça te met mal à l’aise, tant mieux. C’est exactement là qu’il voulait t’emmener.
★★★★★
Todd Rundgren “A Wizard, a true star”