L’IA va-t-elle tuer la musique au Royaume Uni ?

Des artistes britanniques se lèvent contre un projet du gouvernement qui faciliterait l’exploitation de leurs œuvres par l’intelligence artificielle. Faut-il voir une menace existentielle pour la création ou une simple adaptation inévitable au progrès ?
Le Royaume-Uni est-il sur le point de sacrifier ses industries créatives sur l’autel de l’intelligence artificielle ? C’est ce que dénoncent plus de mille artistes, de Sting à Elton John, en passant par Damon Albarn et Annie Lennox, qui ont lancé un cri d’alarme contre une réforme gouvernementale prévoyant d’assouplir le droit d’auteur au bénéfice des entreprises d’IA.
Un passe-droit pour l’IA ?
Le projet, explique Franceinfo, est porté par le gouvernement travailliste de Keir Starmer. Il entend faciliter l’utilisation des œuvres pour entraîner les modèles d’intelligence artificielle, sans autorisation préalable de leurs créateurs. Les artistes pourraient certes “réserver leurs droits”, mais ce mécanisme inverserait la logique actuelle en forçant les auteurs à se protéger activement, plutôt que d’être protégés par défaut.
Cette proposition a déclenché une levée de boucliers dans un pays où les industries créatives pèsent 120 milliards de livres par an et emploient 2,4 millions de personnes. Une tribune signée par Elton John, Dua Lipa et le prix Nobel Kazuo Ishiguro dans “The Times” dénonce une réforme “inutile et contreproductive“, tandis que les plus grands journaux britanniques du “Guardian” au “Daily Mail” ont uni leurs voix en une pour exiger que l’IA ne signe pas l’arrêt de mort du droit d’auteur.
Un album silencieux pour faire du bruit
Pour marquer les esprits, les opposants ont frappé fort : un album silencieux, intitulé “Is This What You Want?“, a vu le jour. Douze morceaux d’ambiances sonores d’ateliers et de studios vides, dont les titres forment un slogan-choc : “Le gouvernement britannique ne doit pas légaliser le vol au profit des sociétés d’intelligence artificielle“. Un geste symbolique qui rappelle les tensions entre artistes et IA à l’échelle mondiale.
En France, 34 000 artistes ont récemment signé une tribune contre “le pillage” de leurs œuvres par les modèles d’intelligence artificielle. Aux États-Unis, les syndicats des acteurs et du jeu vidéo (SAG-AFTRA) ont mené des grèves pour réclamer des garde-fous. Le combat est global.
Progrès ou prédation ?
Face aux protestations, le Premier ministre Keir Starmer tempère : “nous devons être équilibrés, mais nous avons une incroyable opportunité avec l’IA“. Son objectif est clair : faire du Royaume-Uni un leader mondial du secteur, en créant un environnement favorable aux entreprises innovantes.
Mais à quel prix ? Si l’IA ouvre des perspectives inédites, elle pose aussi des questions cruciales : à qui appartiennent les créations générées à partir d’œuvres existantes ? Jusqu’où l’automatisation peut-elle aller avant d’éroder la valeur même de la création humaine ? Une chose est sûre : la bataille ne fait que commencer. Et vous qu’en pensez-vous ?